Les équipes de WeeFin se sont penchées sur chacune de ces évolutions pour vous proposer un condensé des informations principales à retenir et vous aider à y voir plus clair.
1. Le moment est venu : une consultation sur la révision tant attendue du niveau 2 de SFDR a été publiée !
Les Autorités Européennes de Surveillance (ESA) ont publié le 12 avril un « Consultation Paper » sur la révision du niveau 2 de SFDR. Les autorités européennes attendent des retours sur ces propositions d’ici le 4 juillet. Cette publication entre dans le timing évoqué depuis plusieurs mois sur la place, notamment par l’AMF, qui pourrait conduire à une entrée en application de ces révisions le 1er janvier 2025.
Voici les 3 modifications principales liées à ce texte :
- Une proposition de révision des annexes précontractuelles et périodiques avec notamment sur la forme, l’apparition d’un dashboard, en première page de l’annexe et la disparition du tableau sur l’allocation d’actifs. Dans le fond, on remarque l’apparition d’une nouvelle partie sur les objectifs de décarbonation.
- Le texte apporte des précisions sur certains points méthodologiques : La communication liée au DNSH, le calcul des dérivés dans le cadre des PAI et la définition des « Equivalent information ». Pour retrouver le détail, cliquez ici.
- L’introduction de nouveaux indicateurs PAI sociaux obligatoires sur des sujets divers tels que le tabac, les questions fiscales, l’ingérence dans la représentation des travailleurs et les salaires.
Un premier décryptage, effectué par les experts WeeFin, est déjà disponible ici !
2. Q&A SFDR: Investissement durable et PAI : les clarifications de la Commission européenne éliminent le flou, tout en laissant de la marge de manœuvre aux acteurs financiers
Le 14 avril, les ESAs ont publié les réponses tant attendues de la Commission Européenne aux questions posées en septembre 2022 sur l’investissement durable, les indices PAB et CTB et la prise en compte des PAI.
Dans l’ensemble, les réponses sont utiles et n’ont pas conduit à un renforcement des normes tel que cela avait été redouté. Au contraire, la Commission Européenne a rappelé à plusieurs reprises que les choix méthodologiques restent à la main des acteurs financiers.
Voici les 5 points clés à retenir :
- La Commission Européenne ne fixe pas d’exigences minimales pour qualifier des concepts tels que la contribution environnementale/sociale positive, le DNSH ou la bonne gouvernance, c’est-à-dire les conditions pour qualifier un “investissement durable”, laissant la responsabilité aux acteurs financiers d’effectuer leur propre évaluation pour chaque investissement et divulguer leurs hypothèses sous-jacentes.
- Il est possible d’investir dans des activités durables par nature, des activités menées de manière durable et des activités en transition. Pour ces dernières, les investissements durables doivent se conformer au test DNSH et de bonne gouvernance dès aujourd’hui (les plans d’amélioration futures ne seraient pas acceptables).
- La notion d’investissement durable peut être mesurée au niveau d’une entreprise et non seulement au niveau d’une activité spécifique. A la question de savoir si l’investissement dans une entreprise dont 20% de l’activité était liée aux énergies renouvelables devrait être considéré comme un investissement durable à 100% ou seulement à 20%, la commission européenne ne tranche pas et laisse aux acteurs financiers de choisir l’une ou l’autre méthode d’agrégation.
- La Commission a clarifié la notion de “prendre en compte” les PAI. Les acteurs financiers doivent divulguer les politiques et procédures qu’ils ont mis en place pour atténuer les PAI en plus du reporting quantitatif des PAI au niveau produits.
- Les ETF qui ont été récemment rétrogradés de l’Article 9 à l’Article 8 pourraient être reclassés en tant qu’Article 9 s’ils suivent des indices de référence alignés sur Paris (PAB) et des indices de transition climatique (CTB).
3. Les critères techniques des 4 derniers objectifs enfin publiés, la taxonomie environnementale en passe d’être finalisée ?
Les critères techniques liés aux 4 derniers objectifs de la taxonomie Environnementale, connus sous l’acronyme « taxo4 », ont été publiés par la Commission Européenne. Les acteurs sont invités à donner leur avis sur ces propositions jusqu’au 3 mai (Ici en anglais). Ces textes reprennent les critères techniques permettant d’évaluer si une activité est« durable » au sens de la réglementation.
Les 4 objectifs couverts par cette publication sont les suivants :
- L’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines;
- La transition vers une économie circulaire;
- La prévention et le contrôle de la pollution;
- La protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.
Avec ces nouveaux textes, l’ensemble des objectifs environnementaux sont à présent couverts par la taxonomie, ce qui représente pour les acteurs une étape importante dans la mise en conformité avec les réglementations européennes.Ces éléments sont très techniques, ils reprennent des seuils, par industrie, pour pouvoir déterminer si une activité est durable. On remarquera toutefois que l’aviation a été intégrée dans les activités éligibles à la taxonomie. Même si son alignement se fait sous condition, notamment de l’utilisation de carburant durable (sustainable aviation fuel (SAF)), cette intégration ne manque pas de faire réagir.
Pour découvrir le calendrier prévisionnel d’entrée en vigueur des obligations de reporting, cliquez ici.
4. Les propositions faites par le comité du label ISR, évolution ou révolution ?
Le comité du Label ISR a publié le 18 avril 2023 des propositions de révision du référentiel du label ISR pour le rendre plus exigeant, plus lisible pour les épargnants et plus efficace pour soutenir les avancées de la finance durable. Une consultation est ouverte sur ces propositions du 18 avril au 31 mai 2023 et la date de publication du référentiel final devrait être le 30/09/2023.
Les propositions à s’articulent autour de 2 pôles :
- De nouvelles exigences, permettant notamment une meilleure articulation avec les réglementations européennes :
- L’intégration d’un socle commun d’exclusions sectorielles et normatives avec des seuils quantitatifs d’exclusions telles que : l’exclusion des émetteurs dont plus de 5% de leur chiffre d’affaires est réalisé via du charbon ou des énergies fossiles non conventionnelles ;
- La pondération minimale de 20% de chaque pilier E, S, G dans la note globale;
- Les 2 indicateurs de surperformance choisis par le fonds dans le cadre du label ISR doivent être représentés par les 2 PAI SFDR les plus en lien avec l’objectif ESG du fonds et doivent être à minima couverts par 90% des entreprises en portefeuille ;
- L’engagement renforcé auprès des sociétés des secteurs à fort impact climatique, comme défini dans la règlementation SFDR, et l’accompagnement des autres sociétés dans leur démarche de transition.
- Des exigences existantes renforcées :
- Les approches en sélectivité et en amélioration de note augmentent la pourcentage de réduction de l’univers d’investissement initial, il passe de 20% à 30% ;
- Le recours à des outils d’alerte pour l’identification, le suivi et la gestion des controverses devient obligatoire.
Si ces propositions sont acceptées telles quelles, les acteurs financiers détenant des fonds labellisés ISR devront rapidement se mettre en ordre de marche pour répondre à l’ensemble des critères sous peine de perdre la certification.
5. La place donne sa vision de l’investissement durable : L’AFG publie “sa” définition de l’article 2§17
Nous vous en parlions dans un précédent article, le manque de clarté de la définition réglementaire d’un investissement durable a conduit les acteurs à différentes interprétations. L’AFG a publié récemment des grands principes communs pour assurer une certaine convergence de place.
Deux points méthodologiques majeurs sont à retenir de cette publication.
- L’AFG propose de considérer une entreprise comme durable dans sa totalité, et donc de ne pas descendre à une granularité plus fine, c’est-à-dire celle des activités.
- La durabilité peut être “active” et/ou “engagée”. Contrairement à d’autres doctrines plus strictes, L’AFG propose de considérer une entreprise comme durable dès lors que son engagement est mesurable et opposable.
Le document reprend ensuite les 3 parties de la définition d’investissement durable selon SFDR en proposant des critères permettant de répondre à chacune des parties :
- La contribution à un objectif d’investissement durable. Afin de traduire les deux facettes de la durabilité (i.e active et engagée), l’AFG propose d’utiliser, au choix de l’acteur :
– Des éléments quantitatifs comptables comme le Chiffre d’Affaires, le CapEx et l’OpEx (y compris prévisionnels) en lien avec la contribution à une objectif d’investissement durable
– Des éléments quantitatifs non-comptables comme, les plans de transition des entreprises alignés sur l’Accord de Paris. ou “Tout autre élément quantitatif permettant d’évaluer le caractère contributif de l’entreprise à un objectif S pour autant que les indicateurs/ la méthodologie d’évaluation soient précisés par la société de gestion”.
- Do no Significant harm : L’association reprend l’obligation d’utiliser les PAI pour démontrer le DNSH. Elle propose de faire appel à une analyse autre (type scoring ou évaluation des controverses) afin de pallier le manque de données actuel sur ce sujet.
- Bonne gouvernance : Il serait possible d’utiliser un indicateur G, très général, pour fixer un seuil. Pour autant, cet indicateur doit intégrer les piliers évoqués dans la réglementation.
Le texte de l’AFG propose d’étendre très largement la définition d’investissement durable, notamment aux émetteurs qui sont uniquement “engagés”. Très peu de contraintes sont à relever de ce texte qui traduit une vision d’une partie des acteurs de la place.
On remarquera toutefois que cette vision va à l’encontre des réponses actuelles apportées par le régulateur (voir ci-dessus – texte B). En effet, la Commission Européenne précise dans ce texte qu’un plan d’action ne peut être suffisant pour considérer un émetteur comme investissement durable.
6. L’AMF prend position sur certains éléments méthodologique de la SFDR
Lors de la journée de formation des RCCI, le 25 mars, L’AMF a précisé certains points de mise en conformité encore en débat chez les acteurs, voici quelques éléments méthodologiques importants :
- Définition d’investissement durable : Quel niveau de détail utiliser dans les annexes SFDR ?
- Contribution à un objectif d’investissement durable : Les SGP doivent s’engager et publier les seuils minimums quantifiés relatif à leur méthodologie d’investissement durable.
- DNSH : Les 14 indicateurs du tableau 1 de l’annexe 1 des RTS SFDR doivent être pris en considération. Il est possible de recourir à des proxies qualitatifs et quantitatifs lorsque les données ne sont pas disponibles, toutefois, ces proxies doivent être systématiques.
- Comment prendre en compte les dérivés dans l’investissement durable ?
- L’autorité maintient la position de l’ESMA, à savoir qu’il faut compenser les positions longue et courte, pour obtenir une position nette ;
- Il est nécessaire de faire une transparisation pour analyser les sous-jacents, les contreparties ne sont pas à prendre en compte ;
- Les actifs dont les performances sont swappées via un TRS sont exclus du numérateur.
- Comment prendre en compte les dérivés dans le pourcentage d’alignement Taxonomie ?
- Les expositions longues ainsi que les actifs dont la performance est swappée par un TRS, sont exclus du numérateur.
- Comment prendre en compte les dérivés dans les indicateurs PAe ?
- L’autorité maintient la position de l’ESMA, à savoir qu’il faut compenser les positions Longue/Courte, avec une limite à 0 ;
- Il est nécessaire de faire une transparisation pour prendre en compte les sous-jacents.
- Comment traiter le sujet de la classification des fonds de fonds ?
- La transparisation des fonds de fonds n’est pas obligatoire. Les SGP peuvent considérer, par défaut, un produit « Article 9 » comme durable. Néanmoins, il est nécessaire d’assurer une certaine cohérence entre les objectifs durables des fonds sous-jacents et celui du fonds de fonds, sans plus de précision sur le niveau de cohérence attendu.
- Peut-on recourir à des données estimées pour le calcul Taxonomie des fonds ?
- Il est possible d’utiliser les données estimées pour le calcul Taxonomie des fonds si elles respectent les critères des « informations équivalentes » du Q&A des ESA.
- Pour les acteurs ayant recours à des données estimées, il est nécessaire d’effectuer les Due Dilligence nécessaires et d’assurer la transparence sur ce sujet dans les annexes SFDR.
- Le recours aux renvois est-il autorisé dans les templates ?
- Afin d’assurer une certaine concision, il est possible de renvoyer vers le corps du prospectus si cela ne nuit pas à la clarté.
Bibliographie