Les fonds ESG étant relativement récents, la crise du Coronavirus a représenté un très bon test pour étudier leurs comportements en situation de choc économique. De nombreux articles et dossiers ont été produits dans le but d’analyser la situation sur les marchés. Nous en avons étudié 14 afin de mettre en exergue les tendances et raisons pour lesquelles les portefeuilles ESG ont surperformé comparativement à leurs benchmarks. Les politiques d’exclusions et de sélection des fonds sont les raisons souvent évoquées pour expliquer la surperformance des fonds ESG mais cette crise a permis la mise en lumière de l’importance des piliers S (social) et G (gouvernance) ou l’objectif “long terme” des investisseurs.
La stratégie d’exclusion consiste à exclure d’un portefeuille d’investissement les secteurs ou entreprises qui ne répondent pas à des critères ESG spécifiques. C’est la principale raisonévoquée dans la moitié des documents étudiés pour expliquer la surperformance des fonds. C’est notammentl’exclusion des portefeuilles de certains secteurs comme l’énergie, ou encore les matières premières qui est cité comme la raison principale. Ces secteurs se sont en effets retrouvés en première ligne de la baisse d’activité liée aux différents “lockdowns”. L’exemple du secteur des énergies fossiles est parlant : le confinement quasi généralisé engendré par la pandémie a fait considérablement chuter la demande et donc les prix du pétrole… AXA IM a ainsi montré qu’un portefeuille d’actions qui applique des politiques d’exclusion a surperformé l’indice de référence parent de 47 points de base en moyenne[1].
L’exclusion n’est cependant pas la seule raison de surperformance pendant la crise. Dans deux tiers des articles analysés, la raison de la surperformance évoquée était la sélection d’entreprises plus durables en portefeuille. Plus les fonds étaient exposés à des entreprises durables, plus la surperformance par rapport au benchmark était importante (une contribution de 45 bps de surperformance aux US, 144 bps pour les marchés développés hors US et 105 bps pour les marchés émergents).
Les fonds ESG ont également tendance à surpondérer leur exposition à des secteurs qui ont mieux résisté à la crise comme la santé, la technologie, et sous-pondérer les secteurs plus impactés comme le transport, l’énergie, les matériaux. Alors que l’indice MSCI World a baissé de 14.5% en mars 2020, 62% des fonds ESG de grandes capitalisations ont surperformé l’indice.
La crise du covid a été un nouveau révélateur de l’importance de la gouvernance et de l’aspect social des entreprises. Le traitement réservé par les entreprises à leurs employés a fait la une des journaux. En effet, certaines entreprises ont été félicitées pour la façon dont elles ont managé leur personnel durant la crise, ou ont réduit les salaires des dirigeants pour soutenir leur activité. Dans un sondage réalisé auprès de conseillers financiers indépendants (IFA) britanniques par le gestionnaire d’actifs Federated Hermes, plus de trois quarts des personnes interrogées ont estimé que les investisseurs seraient prêts à se séparer des entreprises qui n’ont pas su soutenir leurs employés ou la société en général pendant la crise.
La résilience de fonds ESG par rapport aux fonds classiques a permis une “réévaluation” majeure des questions sociales et de gouvernance dans les notations ESG, une mise en avant l’importance de ces deux piliers parfois mis au second plan face à l’omniprésent enjeu climatique. Les sociétés ayant de bonnes relations avec la clientèle ou une culture d’entreprise bien ancrée affichent des performances financières solides. La résilience est plus forte pour les critères jugés comme importants en temps de crise, les questions liées à la gouvernance telles que l’efficacité du conseil d’administration et les questions liées aux parties prenantes telles que les relations avec les clients présentent une valeur ajoutée relativement plus élevée durant cette période. (graphique Blackrock appendixe A)
Cette analyse montre l’importance d’un mix intelligent de facteurs environnementaux (la demande d’énergie, la pollution, …), sociaux (les conditions de travail, …) et de gouvernance (pression sur le bilan) dans un scénario extrême. La crise a permis de démontrer l’influence de ces facteurs extra-financiers sur la position concurrentielle des entreprises.
Le dernier axe d’analyse ne concerne pas directement la stratégie des investisseurs mais leur comportement. Les investisseurs prenant en compte les critères ESG s’intègrent dans un objectif long terme, ce qui explique qu’il y ait eu moins de désinvestissement des fonds durables et que les investisseurs par, « loyauté », conservent leurs positions. Les critères ESG jouent un rôle de plus en plus important dans les décisions d’investissement et leur résilience prouvée durant la crise du Covid-19 ne peut que jouer en leur faveur pour l’avenir. Les fonds ESG ont été ainsi vus comme des « valeurs refuges ».
Amundi a ainsi analysé les flux d’investissement dans 1 662 ETF cotés sur le marché américain, dont 75 ETF classés ESG, 24 spécialisés dans les questions environnementales (faibles émissions de carbone, eau, énergie propre, etc.), 53 spécialisés dans les soins de santé et 30 dans les technologies. Les fonds ESG n’ont pas subi de désinvestissement massif lors du lockdown de l’Italie, au contraire des fonds traditionnels et n’ont pas servi de variable d’ajustement aux investisseurs pendant les soubresauts de la crise.
Cependant, pour avoir une stratégie ESG pertinente et en lien avec les valeurs de investisseurs il faut commencer par choisir et trouver le bon fournisseur de données. Une analyse[3] du MIT a montré que dans un ensemble de notes ESG provenant de cinq évaluateurs différents, la corrélation entre les scores de 823 entreprises était en moyenne de 0,61. Cela signifie que “les informations que les décideurs reçoivent des agences de notation [ESG] manquent de cohérence”, indique le document. La surperformance n’est donc pas garantie, et le défi consiste donc à mesurer avec précision l’impact ESG matériel sur la stratégie des entreprises. Chez WeeFin, nous accompagnons les investisseurs dans cette définition de critères ESG en phase avec leur stratégie financière, notamment grâce à notre plateforme ESG Access.